Premiers pas.
Premiers pas à la prépa, donc, une banderole énorme pour nous accueillir, et une entrée majesteuse. A l'intérieur, ça sent un peu la peinture, mais par au desus, il y a le goût plutôt amer de l'inconnu. Les gens sont gentils, tellement gentils. Ils ne mentent pas, ou presque. Latin, grec tu risques de mourir écrasée sous l'alphabet. Oui, la cantine est infecte. Tu vois le prof là ? Il est dingue. Randonnée de 17 km pour la journée d'intégration, ouais il paraît qu'à la fin t'es intégrée, moi j'ai pas vu d'où, mais bon. Ah, les khôlles, c'est maximum 12. Cinquante environ par classe, 20% qui partent. Certains font des cures de vitamines, moi je préfère somnoler, c'est comme tu veux. L'internat c'est super, tu verras. Le sport ? Ouais, y en a. Mais on est deux. Sur quatre vingt dix. Tu peux sortir jusqu'à minuit. =)
Certes, personne ne me cache la quantité gigantesque de travail à fournir, tous les bouquins à lire (soi-disant (a)) avant la rentrée, et le fait qu'on me dira directement si je n'ai rien à faire en prépa ou non ; mais j'ai réellement apprécié la structure et la promesse de ce deux ans qui s'annonçent particulièrement éprouvants enrichissants. Ca doit faire un peu la fille trop optimiste, qui va moins rigoler au bout de la première semaine, mais bon. Je suis assez motivée, ça devrait suffir pour me faire tenir jusqu'en juin pour avoir ce foutu bac et avoir droit enfin à un nouveau départ.
D'ailleurs, là bas, on repère déjà la future classe, les différents groupes qui s'y formeront. Genre, quand on fait la queue patiemment depuis 3/4 d'heures pour parler au prof de philo et qu'un petit brun à mèche, col roulé et faux air décontracté se la ramène l'accapare avec de grands moulinets de bras et des hochements de tête entendus. Celui-là, on sait direct que c'est le genre à poser une question dans les dernières cinq minutes de cours et que CA NE PEUT PAS ATTENDRE DEMAIN, non. Ma foi, seule solution envisageable pour l'année prochaine, lui baisser violemment le bras à chaque fois qu'une inspiration hautement interrogative lui traversera l'esprit. Au moins une fois sur deux, quoi. =')
Puis il y a ceux qui te frôlent, laissant un courant d'air chargé de parfum limite toxique sur leur passage. Trench beige pour lui, coiffure branchée, mocassins vernis, et caban rouge fluo, cheveux blonds méchés et lissés parfaitement, sac de créateur pour elle. Leurs rires moqueurs s'entrechoquent à chaque passage d'un de leurs collègues qui escortent les futurs hypokhâgneux, parce qu' "eux sont trop biens pour faire ça." Leur portable sonne d'ailleurs toutes les dix minutes, je vois bien qu'il n'ont pas le temps pour ce genre de niaiseries. Je ne pensais pas qu'en prépa on trouvait encore ce genre de spécimen, mais apparament ils sont partout.
Reste les autres, ceux qui essaient de dépeindre avec naturel et simplicité leur cadre de travail et de vie, qui répondent aux questions avec le maximum de sincérité possible. Les profs qui inspirent direct le respect et qui balayent les doutes d'un revers de main. Je repère le chemin jusqu'à ma future chambre, et les endroits par où je pourrais m'évader, au cas où.
J'aime déjà cet endroit, en fait. =)